Certes, le jeu de boules existe très certainement depuis la nuit des temps. Une boule est faite pour rouler et on imagine mal que les enfants des hommes, pour qui le moindre objet est un jouet, n’aient pas eu l’idée d’utiliser la moindre pierre ronde pour s’amuser.
La première confirmation que nous possédons nous vient des Grecs. Cependant, leur jeu de boules n’était pas encore un jeu d’adresse. L’exercice consistait alors à envoyer le plus loin possible une série de cinq boules comme au lancer du poids. Au cours des siècles, ce jeu se serait affiné et, de jeu de force, serait devenu jeu d’adresse.

Boule de granit
La découverte en Méditerranée par un pêcheur sous-marin, de boules de pierre semble moins sérieuse, bien que plus pittoresque. Pressés de donner leur avis, des chercheurs reconnurent l’authenticité de la trouvaille et précisèrent qu’il ne pouvait s’agir d’armes de jet. A quoi pouvaient donc servir ces boules alors ? Les bouillants Marseillais n’ont pas tardé à donner la réponse : ils ont placé les dites boules dans une vitrine du musée Borély, avec une inscription indiquant « Les ancêtres de la Pétanque », revendiquant ainsi aux Phéniciens la paternité de leur jeu favori.
Ce qui est certain, c’est que nous devons l’invention du but (cochonnet) aux Romains. Héritiers du jeu de boules des Grecs, ils ont fait de ce dernier un jeu d’adresse consistant à envoyer les boules le plus près possible du but. Il ne restait plus qu’à en déterminer les règles et il faudra près de vingt siècles pour que les boules remontent le Rhône jusqu’à Lyon afin d’y trouver leurs législateurs impitoyables.

Jeu de boules à la Renaissance
En attendant, la France s’amuse. Dans le livre Boules, quilles, bowling, Charles Tardieu écrit que le roi Charles V pris le 23 mai 1369 une ordonnance interdisant de jouer aux boules comme un certain Préfet de Police du XXe siècle…
Au fil du temps, le jeu du cochonnet devint de plus en plus populaire. Tout comme la boule, il connu des transformations. Jusqu’au début du XXe siècle, les parties se disputaient sur une distance de 15 à 20 mètres, par équipe de trois : pointeur, milieu et tireur. Pour tirer le joueur devait exécuter trois sauts successifs avant de lâcher la boule : c’est le « jeu provençal » ou « longue », lui-même issu du « jeu à la lyonnaise ».

Joueur à la « longue »
Dans tout le midi, la « longue » était reine. Pratiquement ignorée du reste de la France, elle avait ses règles précises et ses traditions. C’était pour le voyageur une attraction qui ne dépassait pas le stade de l’amusement local.
C’est en 1907, au cours d’une partie disputée à La Ciotat (Bouches-du-Rhône), que Ernest Pitiot eu l’idée d’inventer une nouvelle forme de jeu, pour permettre à son ami Jules Lenoir de continuer à pratiquer les boules malgré ses rhumatismes. L’appellation pétanque date de 1910, avec le premier concours officiel à La Ciotat. Le terme vient du provençal « Ped Tanco », c’est à dire « pieds tanqués », ancrés sur le sol, par opposition au « jeu provençal » où le joueur peut prendre de l’élan.
A ses débuts, la pétanque avait alors mauvaise réputation : c’était la détente et distraction des fainéants, bons à rien et même voyous; certains de ces messieurs traçaient le cercle avec la pointe de leurs couteaux, quand ce n’était pas avec la crosse de leur revolver.
Marcel Pagnol fit rire toute la France en lui consacrant l’un des morceaux de bravoure de sa trilogie : le fameux passage où une partie de pétanque arrête le tramway. Jouer à la pétanque ne faisait décidément pas sérieux. Mais le temps travaillait pour lui.

La « scène du Tramway » de Pagnol revisitée
Les Parisiens, en vacances « sur la côte », prirent peu à peu l’habitude de s’intéresser à ces véritables comédies provençales jouées sous les platanes des places des villages. Cela leur paraissait simple, amusant et facile. Ils s’y essayèrent : le ver était dans la pomme.
Soudain ce fut l’explosion, inattendue, formidable : en moins de cinq ans, toute la France, surprise, se retrouva la boule en main, de Dunkerque à Tamanrasset. En une saison Paris fût investi, pris d’assaut, envahi : sur le moindre bout de terrain vague, on frappait au fer ! Cette vague sudiste inquiéta tellement le Préfet de Police Papon qu’il tenta de l’interdire : ce fut un tollé. Il revint sur sa décision, évitant ainsi une guerre de sécession meurtrière.

Boule de pétanque cloutée
Il faut attendre 1930 pour que les traditionnelles boules en bois soient remplacées par de l’acier. C’est à Jean Blanc que l’on doit cette évolution dont la marque JB Pétanque n’existe plus.
En 1960, Ernest Pitiot, âgé de 81 ans, inaugure lui-même une plaque commémorative sur le terrain qui avait vu naître une nouvelle religion.
Partis d’un petit village du Var, la pétanque a alors franchit toutes les frontières… Espagne, Italie, Allemagne jusqu’aux Etats-Unis et au Japon…

Un des terrains du Mondial la Marseillaise
Aujourd’hui, on peut dire que la France compte 68 millions de boulistes en puissance !